L’agressivité dessert-elle la cause animale?

Pour faire suite à mon dernier article (Mais pourquoi les végans sont-ils si méchants ?), je voulais pousser la réflexion plus loin et expliquer pourquoi, selon moi, l’agressivité de certains militants dessert la cause animale.

Primo, on risque de s’isoler entre vegans

Quand on commence à parler ouvertement de la cause animale, je crois qu’il est inévitable de s’isoler de certaines personnes de son entourage.

Cela peut venir de nous. On va soudainement voir l’exploitation animale partout. Absolument PARTOUT. Dans l’assiette d’un ami. Dans le mascara de sa collègue de bureau. Dans les sacs en cuir plébiscités par les magazines de mode. Au cinéma, dans des scènes faisant appel à des animaux. Dans un Doliprane. Où qu’on tourne la tête, on analysera les choses dorénavant sous le spectre de la souffrance animale. Face à l’indifférence quasi-générale de notre entourage, notre patience est mise à rude épreuve et le ton peut vite monter. On éprouve alors le besoin de se rapprocher de personnes qui partagent les mêmes valeurs. S’opère au final un tri plu ou moins drastique dans nos fréquentations.

Et cela peut aussi venir des autres, probablement lassés qu’on leur fasse la morale s’ils ont le malheur de sortir un saucisson pour l’apéro. Je ne vais pas débattre ici sur s’ils ont raison ou tort d’adopter ce comportement, le fait est que nos proches peuvent décider de moins en moins nous voir, que ce soit par exaspération de nous entendre parler d’exploitation animale à chaque fois qu’ils nous voient, ou parce qu’ils se sentent agressés et jugés. Et si quelqu’un se sent agressé, il va tout naturellement réagir sur la défensive.

Extrait de la BD de Veni Vidi Veggie.

Extrait de la BD de Veni Vidi Veggie.

 

J’ai vécu ces deux cas de figure. Et j’ai réalisé que si ça continuait, j’allais m’ostraciser complètement de mon entourage. Or devenir une végane qui parle qu’à d’autres véganes, ça ne m’intéressait pas du tout. Manger qu’avec des véganes, discuter qu’avec des véganes, ne fréquenter que des véganes, ça allait certes m’apportait confort et acceptation, mais ça n’allait pas aider les animaux. Pour changer un système, il faut s’y mélanger, et non s’en isoler.

 

Deuxio, c’est d’expérience contreproductif

Après une période de prosélytisme qui fut un échec (avouons-le), j’ai peu à peu recalibré mon discours en m’efforçant de faire preuve de plus de douceur et bienveillance envers mon interlocuteur, ou même de le laisser tranquille tout simplement. Ça n’a pas été facile du tout et ça ne veut surtout pas dire que je ne m’indigne plus. Mais je me suis rendue compte qu’avoir une attitude positive invitait davantage au changement. J’ai ainsi vu certaines personnes de mon entourage -jusque là imperméable à mon discours moralisateur- se montrer curieux et me poser des questions.

Ce passage de « L’Homme Sans Argent » (un super bouquin dont je parle plus en détail ici) l’explique bien mieux que moi:

« Au début, je n’arrêtais pas de râler en leur [mes parents] disant à quel point tout ce qu’ils faisaient était mal, que mon opinion était la bonne et qu’ils devaient changer. Bien évidemment, cela érige des murs, des défenses à travers lesquelles personne ne veut vraiment communiquer. C’était moi qui avais besoin de changer. J’arrêtai de les harceler […] Six mois après avoir pris la décision de les laisser tranquille, je remarquais quelques changements. Un jour, ma mère m’appelait pour me dire qu’ils avaient décidé de devenir végétariens. Une autre fois, elle m’informer qu’elle allait arrêter d’acheter autant de choses. Simplement en leur fournissant des informations, sans jugement, sans prétendre avoir raison, je vis mes parents commencer à se poser eux-mêmes des questions, non pas parce que je leur disais de le faire, mais parce qu’ils le souhaitaient. […] Je commence à réaliser que je n’ai aucun droit de critiquer des défauts que nous avons tous, ou avions tous. Ce qui est plus constructif, c’est de se soutenir les uns les autres en essayant d’apporter ne serait-ce que le plus petit changement positif pour la planète. C’est ainsi que nous ferons tomber les murs et engagerons un vrai dialogue ».

 

Tertio, c’est paradoxal avec ce qu’on prône

Nous invitons tout le temps les mangeurs de viande à faire preuve d’empathie et de compassion, c’est-à-dire à se mettre à la place des animaux qui finissent dans leurs assiettes. Or nous oublions souvent de nous mettre nous-mêmes à la place d’un éleveur surendetté, d’un travailleur en abattoir qui n’a certainement pas choisi ce métier par vocation ou d’un omnivore qui ne diminue pas sa consommation de viande assez vite à notre goût.

Dans ces cas là, le jugement hâtif est bien souvent de mise. Du « connard d’éleveur », à « l’omnivore égoïste » ou encore à « l’employé d’abattoir sadique », une personne se résume alors aux attributs du groupe auquel elle appartient, au détriment de son individualité. Tout le monde est mis dans le même panier, hop, emballé, c’est pesé. Mais on oublie par exemple que:

  • Certains éleveurs se retrouvent pris à la gorge par un système qui leur permet à peine de joindre les deux bouts. Comment espérer qu’ils changent d’activité si nous ne les épaulons pas vers une sortie de crise ? Est-ce que quelqu’un s’imagine vraiment qu’en écrivant « change de métier ducon » sur Facebook, cela va porter ses fruits ?
  • Quant aux employés d’abattoirs, ils prennent souvent ce métier par défaut, pas parce que petits ils disaient à la maîtresse « moi plus tard, je travaillerais dans un abattoir ! ». La plupart n’y sont d’ailleurs pas heureux (en témoigne le haut turnover de salariés et le nombre grandissant de lanceurs d’alerte qui prennent des risques pour dénoncer les horreurs qui s’y pratiquent). Vous pouvez d’ailleurs lire à ce sujet l’article du Vegan Strategist que j’ai traduit: « Employés d’abattoirs : les autres victimes de l’industrie de la viande« .

A généraliser ainsi, on risque de s’ancrer dans l’opposition, où chacun campe sur ses positions, et parle pour parler, sans écouter l’autre, ni essayer de comprendre. Lors d’une action avec L214 au salon de l’Agriculture, je me souviens d’une discussion avec de jeunes éleveurs. Ils m’expliquaient qu’il était rare qu’ils puissent discuter avec des défenseurs des animaux car le ton monte tout de suite et les insultes fusent des deux côtés. Alors certes, on ne trouvera sûrement pas de terrains d’entente entre éleveurs et végans, mais il n’empêche qu’on peut se comporter en personnes civilisées.

vegan-aggressivité-la-carotte-masquee

Végane pragmatique

Au final, si j’ai maintenant mis de l’eau dans mon vin, ce n’est pas parce que je me suis résignée ou que j’ai baissé les bras. Non, c’est par pragmatisme, tout simplement. Je me suis rendue compte que ma voix portait mieux ainsi, et que j’aidais donc mieux les animaux en prenant sur moi et restant calme.

Bien sûr, ceci est un point de vue purement personnel. Point de vue qui a d’ailleurs beaucoup évolué au cours de mes années de véganisme (et qui changera peut-être encore). Il est le fruit de mon histoire, mes expériences, mes observations et discussions avec d’autres comparses véganes, végétariens et omnivores. Vous pouvez bien sûr avoir une approche ou un point de vue différents, sans doute ces méthodes se complètent-elles et parlent différemment à différents groupes de personnes. Auquel cas n’hésitez pas à le partager en commentaire. Je les lis toujours avec attention.

[bctt tweet= »Réflexion : l’agressivité dessert-elle la cause animale? » username= »Madame_Carotte »]

 

You May Also Like

20 Comments

  1. 1

    Mon dieu que c’est dur de rester calme… Je suis vegetalienne depuis très peu de temps, je fais encore des écarts et je suis encore dans un état d’impuissance, de frustration et de culpabilité quasi-permanent. Quand j’entend des énormités sur les protéines ou les besoins en fer ou le fameux « ah non moi j’aime trop la viande mais ouais t’as raison les abattoirs c’est caca » je sors de mes gongs. Je me suis fâchée avec des gens de mon entourage, je ne sais pas si ça vient de moi ou d’eux ou les deux. Mais si eux se sentent jugés et agressés, et bien moi aussi. Le sujet est presque devenu tabou avec de nombreuses personnes et je refuse de plus en plus d’invitations au restau ou chez des amis parce que ça me fatigue d’avance de devoir demander un plat spécial, de devoir me justifier, écouter les railleries, etc. Bref je m’isole ! J’essaie de me calmer et d’être bienveillante mais je ne sais pas comment faire 🙁

    • 2

      Coucou Sophie,
      Ecoute je te comprends à 100% car je suis passée par là, j’avais juste envie de crier aux gens d’ouvrir les yeux. Cette impuissance et l’isolement qui a suivi m’ont rendue malheureuse. Pour en avoir discuté avec pas mal de monde, je pense que c’est dans de nombreux cas un passage obligé. Ensuite on trouve un certain « rythme de croisière » qui permet de mieux encaisser les piques gratuites et autres agressions (car tu as raison, nous nous sentons nous aussi constamment jugés). Ceci dit, même si je suis persuadée que l’agressivité ne mène à rien,je suis humaine, et il m’arrive encore de m’énerver. Je vais bientôt publier un article sur les « conseils pour rester calme dans un débat sur le végéta*isme », peut-être qu’il t’aidera 🙂

  2. 3

    Merci pour ce nouvel article toujours aussi intéressant!
    Je partage tout à fait ton point de vue, et cela fait écho à ma propre histoire…
    Comme dirait ma naturopathe (elle est vraiment top :-), il ne faut pas être dans le jugement, car si on commence à juger les autres alors ils nous jugeront en retour…et aujourd’hui, nous sommes trop souvent dans la critique plutôt que dans la discussion, le partage, et l’envie d’apprendre des autres.
    Merci à toi, le cheminement de mon coté est encore long…

  3. 5

    Je suis tellement d’accord avec toi ! Je fais le même raisonnement (je suis végétarienne). En plus en ce moment je rédige mon mémoire après avoir fait une enquête auprès de chasseurs et d’éleveurs, et j’ai vraiment pu constater que des fois y’a un dialogue possible, mais seulement si on dépasse les caricatures de part et d’autre. Par exemple, le fait de dire « les chasseurs sont sanguinaires et respectent rien » ou « les éleveurs se fichent de leur bête ils veulent juste les aides », on entend ça tout le temps et ça correspond pas à la réalité qui est évidemment plus complexe. En tant que végétarien, végane, antispéciste, ce qui devrait nous faire cogiter pour adapter nos messages c’est surtout : pourquoi des personnes qui sont convaincues de respecter les animaux considèrent que les tuer est compatible avec ce respect ? Pourquoi continuent-ils ? Quelles sont les différences de raisonnement… est-ce qu’il y a pas d’autres trucs à prendre en compte, des logiques vraiment différentes qu’il faut comprendre. Bon évidemment j’ai un regard sociologique dans le cadre de ce mémoire donc ça m’aide à rester patiente le reste du temps… On manque de données socio sur les végétariens, mais les quelques unes auxquelles j’ai eu accès montrent assez clairement que les végétariens sont majoritairement des personnes assez jeunes (25-35 ans pour simplifier, si on doit faire une moyenne), qui ont fait des études et vivent plutôt en ville. Peut être que mieux comprendre les habitudes, les logiques qui ont lieu dans un cadre de vie différent pourraient aussi nous aider à amorcer ces dialogues et adapter nos discours, en évitant de répéter des trucs dont on sait qu’ils vont pas toucher nos interlocuteurs… voilà, c’est une hypothèse. Ca ferait sans doute un bon sujet d’article, de partir de ces constats pour se demander ce que les défenseurs de la cause animale devrait davantage prendre en compte. Je sais pas si c’est moi qui aurait le courage de faire ça 😀

    • 6

      Merci beaucoup pour tes retours toujours positifs et constructifs 🙂 Quel est le sujet de ton mémoire? Je suis curieuse 🙂
      Et si tu en as l’occasion, tu devrais carrément l’écrire cet article, je trouve la perspective interessante et orientée pragmatisme ! Peut-être cela permettrait effectivement de dépasser le clivage végé / omni !

  4. 7

    Salut, je suis végé depuis bientôt 5 ans et je trouve ton article intéressant.

    Lorsque l’on souhaite faire passer un message, aussi juste soit-il, pourquoi le faire de manière agressive ? Personnellement, j’ai tendance à faire le stricte opposé, ou à rejeter cette information immédiatement.
    Alors que si elle est amenée de manière pédagogique, ou lorsqu’elle éveille la curiosité de l’interlocuteur, l’information sera mieux acceptée et intégrée.
    Même si l’impacte est minime, n’est-ce pas déjà une avancée ?
    Je ne pense pas que tout le monde soit capable de changer drastiquement son alimentation du jour au lendemain (même si je l’ai fait), et féliciter une personne l’encouragera surement plus de continuer dans le chemin qu’il a emprunté, que de le culpabilisé.
    Le combat végé dans sa globalité, est long, très long, donc pourquoi se mettre des bâton dans les roues ?
    Personnellement, de cette manière mon entourage a commencé à ce questionner, faire attention à ce qu’il mangeait en terme de qualité, de réduire leur consommation de viande, voir pour quelques uns arrêté la viande, et je trouve cela déjà très important, pas vous ?

    • 8

      Bonjour Hendrik. Merci pour ton commentaire. Je suis tout à fait d’accord que « tout changement est bon à prendre » (même si c’est frustrant et qu’on aimerait accélérer les choses). Ton expérience fait complètement écho à la mienne. Après, j’ai aussi entendu d’autres personnes dire qu’elles avaient eu besoin d’être un peu « agressées » pour ne pas rester dans leur zone de confort (personnellement, cette méthode n’aurait pas fonctionné sur moi, mais j’imagine que nous réagissons tous différemment). Si tu es anglophone, je te conseille cet excellent article à ce sujet: http://veganstrategist.org/2016/08/30/angry-ism/
      Bonne journée!
      Aurelia

  5. 9

    Bonjour ! Je découvre ton blog grâce à un partage des Cahiers Antispécistes et tes articles me plaisent beaucoup, merci de prendre le temps de les écrire 🙂

    Je ne suis sûrement pas la première à me reconnaître dans l’angry vegan que tu décris, même si ma colère à moi, à cause de ma timidité, a toujours été refoulée. Du coup, j’étais seulement malheureuse, haha…

    Je crois que, quand on devient vegan, les personnes qui nous mettent le plus facilement en colère, ce sont nos proches, avec qui on a bien souvent des valeurs communes (la lutte contre les oppressions, par exemple). C’est eux que l’on voudrait voir ouvrir les yeux comme nous l’avons fait, c’est leurs préjugés ou leurs mauvaises plaisanteries qui font le plus mal. Mais comme tu dis, il y a une manière non violente et non agressive de faire changer les consciences ou plutôt, de pousser à un changement de conscience.

    Je ne parle qu’occasionnellement du véganisme, seulement pour donner ou démentir des informations, ou encore quand on parle cuisine et pâtisserie, là je ne m’arrête plus 🙂 Mais finalement, mes interlocuteurs sont tous des adultes capables, en théorie, de prendre des décisions par eux-mêmes… et ils sont assez nombreux ceux qui, après plusieurs mois, viennent me dire qu’ils ont fait des recherches, ou qu’ils ont changé d’avis sur quelque chose, qu’ils arrêtent la viande/les produits issus des animaux, etc.

    Bref, soyons de bons jardiniers : plantons les petites graines et laissons les germer sans bêcher sans relâche !

    • 10

      Bonjour Maia, merci pour ton commentaire et ravie que le blog te plaise 🙂
      Tout à fait d’accord, les proches c’est le plus difficile (quoique certains trolls twitter peuvent aussi être difficiles à gérer, mais ça joue moins sur notre affect). Je suis persuadée que nous ne sommes pas tous égaux face aux changements: certains arrivent à devenir végan du jour au lendemain, d’autres non (en tout cas aujourd’hui, peut-être cela sera plus simple à l’avenir avec l’offre qui s’étoffe). Du coup, ceux qui y sont parvenus relativement rapidement ont tendance à projeter leurs attentes sur les autres en se disant « moi je suis devenue végé en xx jours / mois, alors pourquoi pas lui/elle? ». Sauf qu’on ne réalise pas que d’autres auraient très bien pu se dire la même chose de nous lors de notre cheminement (moi j’ai mis 2 ans à devenir végane, période durant laquelle des vegans auraient très bien pu se dire « ben elle attend quoi alors?! »).
      On peut toujours faire mieux, mais la graine de réflexion ne pousse pas aussi vite chez tous, voire pas du tout. C’est ce que je me dis pour ne pas décourager: on ne connaît pas le potentiel d’évolution d’une personne.
      A bientôt sur le blog 🙂
      Aurelia

  6. 11

    Franchement, ça fait plaisir de lire des articles comme ça.
    Je suis omnivore, et j’avais réduit ma consommation de viande ces dernières années. Mais, en m’intéressant un peu au végétalisme sur Internet, l’agressivité des vegans m’avait considérablement refroidie. J’en avais marre de leur agressivité et de leur susceptibilité, en particulier avec les personnes qui débutaient à peine sur ce chemin (sérieusement, tout ce que je disais était déformé et même mes petites pointes d’humour (pourtant sur moi) se retournaient contre moi, ô mauvaise personne.
    Donc j’ai laissé tombé.
    Si plus de vegans tenaient ton discours, on les écouteraient d’avantage.
    Près de chez moi (dans la campagne meusienne paumée) un vegan de passage en a rameuté plein d’autre pour faire entendre la voix d’un veau http://www.estrepublicain.fr/actualite/2016/12/30/le-veau-mis-en-scene-pour-noel-fait-scandale étrangement, je pense que les paysans et autres habitants du villages vont être très difficile à convertir au végétarisme…

    • 12

      Merci Lola ! C’est désolant qu’autant de personnes pourtant intéressées par en savoir plus sur le véganisme / végétarisme, se fassent ainsi pointer du doigt voire insulter (car tu es loin d’être la seule malheureusement). Combien en a-t-on ainsi perdu en route? Je me le demande..
      Je pense que ce groupe Facebook pourrait te plaire, le maître mot est la bienveillance, et il est composé de végans, végatariens et omnivorse qui s’entraident: https://www.facebook.com/groups/1pas.apreslautre/
      Quant à l’histoire du veau, je partage les arguments des défensuers des animaux, puisque ce veau n’a rien à faire là, mais effectivement la méthode ne me paraît pas adaptée. Peut-être qu’une discussion calme avec l’éleveur en question aurait porté davantage de fruits. parfois ce genre d’actions a aussi pour but d’être médiatisé afin de toucher des personnes qui n’étaient pas là physiquement, mais après c’est quitte ou double, on ne sait pas comment la presse relatera l’évènement!

  7. 13

    C’est la même chose quand on mange bio et qu’on est écolo (les deux vont d’ailleurs de pair).
    On a tendance à juger ceux qui ne veulent pas se mettre au bio, qui le critiquent ou même qui mangent bio, mais industriel.
    On a l’impression que le monde ne change pas assez vite, que pendant que nous faisons des efforts, les autres s’en contrefichent (ce qui est parfois vrai).
    Ce qui est dur à supporter c’est le fait de faire le maximum pour protéger la planète alors que d’autres ne se posent aucune question et continuent de la détruire.
    Mais, c’est vrai que vivre avec de la colère ce n’est pas bon, ni pour soi, ni pour notre entourage.

    • 14

      Tout à fait d’accord, chez les écolos aussi on retrouve cette problématique et je vous rejoins complètement sur la frustration qu’on éprouve face à ceux et celles qui s’en foutent et « annulent » les efforts que d’autres font. Mais je me dis aussi (peut être naïvement) qu’on ne sait pas quelle va être l’évolution du comportement de ces personnes. Peut-être ne s’en foutent-elle pas mais n’ont simplement pas encore eu le « déclic ». Par exemple, si je prends mon cas personnel, il m’aura fallu 24 ans pour devenir végétarienne (ce qui m’a ensuite conduit au véganisme, au ZD et au minimalisme). Non que je m’en foutais, mais je n’avais pas ouvert les yeux. Je me dis aussi que nous ne sommes aussi pas tous.tes égaux ou égales face au changement. Comme on a tendance à prendre son propre référentiel pour norme, c’est frustrant quand on se dit que les autres ne font pas « aussi bien » ou ne changent pas « aussi vite ».

  8. 15

    Salut 🙂
    Je pense avoir compris ton sentiment sur le sujet, j’ajouterai tout de même que :
    1) Il n’existe pas une seule manière de bien communiquer. Chacun sera plus ou moins sensible à tel ou tel argument ou telle ou telle manière de s’exprimer. Certains s’offusqueront de l’agressivité, d’autres y seront peut être sensibles. Mais tout individu est-il forcément réceptif à une manière de communiquer sur le véganisme/anti-spécisme ? En attendant, chacun tâtonne à sa manière 🙂
    2) Les véganes n’ont pas de devoir d’exemplarité langagière envers tous. Il me semble que lorsque l’on traite du sujet, on oublie trop facilement l’engagement militant de la personne végane (par le boycott et l’étiquette « Vegan » qu’elle portera en diverses circonstances, et potentiellement par d’autres actions). Par cet engagement, elle contribue forcément à la cause animale. On est nombreux à comprendre la frustration, l’impatience ou la colère, certains exprimeront leurs émotions, d’autres se contiendront. Pour autant, doit-on décider qui aurait tord ou raison ?

    Je suis personnellement défavorable à l’utilisation des formules « nuire/desservir la cause animale » car elles ne rendent pas compte de l’engagement de la personne, et font trop systématiquement taire les vrais débats (statut des animaux dans la société) (ce que je ne reproche pas à cet article). Tout ça pour dire : ami·es véganes, enjoués ou en colère, actifs ou pas, bravo et merci pour ce que vous faites ♥

    • 16

      Bonjour Ivy,
      Merci pour ton commentaire! L’article est plutôt une question ouverte et un retour d’expérience, il n’a pas du tout vocation à trancher sur cette question. Comme tu dis, il n’existe pas une seule manière de bien communiquer. Mais comme je suis de nature pragmatique, je me pose la question « quel type de comportement pourrait aider le mieux les animaux? » Même s’il n’y a pas de recette miracle, il y a certaines méthodes et stratégies qui ont démontré qu’elles marchaient mieux que d’autres, du coup je me méfie du « chacun fait comme il / elle veut ». Par exemple, une étude de Faunalytics montrait que 84% des personnes ayant été végéta*iennes ne le restaient pas, et souvent car elles étaient devenues végéta*iennes trop vite et qu’elles n’avaient pas été assez épaulées dans leur transition (bon c’est un peu éloigné du propos de l’article, mais c’est simplement pour illustrer le fait que quand on parle de stratégies militantes, les études peuvent aider à privilégier un point de vue plutôt qu’un autre).

      Le comportement m’apparaît justement comme une des composantes des stratégies militantes, mais je ne connais pas d’étude qui traiterait spécifiquement de cette question. De mon expérience cependant (et c’est grosso modo le même son de cloche que j’ai en en parlant avec d’autres véganes militant.es), l’agressivité n’a jamais marché. Pas une seule fois depuis que je milite. Bien sûr, cela ne veut pas dire que ça ne marchera jamais pour quelqu’un d’autre, mais je trouve ça quand même assez révélateur. De manière générale, je suis assez convaincue qu’on peut bousculer les gens, débattre, informer, faire réfléchir, en restant relativement calme (ce qui n’est pas simple, on est bien d’accord…). Typiquement les insultes sur les réseaux sociaux, ça peut faire du bien à l’instant T à la personne qui les écrit, mais je trouve ça super clivant, et je ne vois vraiment pas comment cela pourrait aider la cause animale d’une quelque manière que ce soit, plutôt le contraire.

      Dans tous les cas je n’aurais pas la prétention d’apporter une réponse à cette question (il y a des bouquins entiers qui débattent de l’efficacité des stratégies animalistes ^^) mais il me semble important que les militant.es s’interrogent sur l’impact de leur militantisme, et se remettent en question s’ils ou elles jugent que tel ou tel comportement est contre-productif avec leur entourage.

      • 17
      • 18

        Merci pour ton retour et pour le lien.
        Il y a tant de choses à dire sur le sujet, c’est assez passionnant !
        A titre personnel, c’est une bonne chose de réfléchir à notre propre manière d’aborder le véganisme et l’anti-spécisme, je suis d’accord avec toi.
        Il me semble quand même important de penser global, et donc de montrer aux non-véganes, qu’on est solidaires malgré nos différents moyens d’expression. Pour le coup, ils repèrent assez facilement quand on se tire dans les pattes, et ça ne nous aide pas non plus ! Ce serait une raison pour ne pas s’accuser entre nous.

        Pour en revenir aux statistiques sur pourquoi une personne renonce à arrêter de consommer de la viande, on peut quand même estimer que « L’attitude de certains végétariens/véganes m’en a dissuadé » est quand même une sacrée excuse hypocrite. Car dans le fond, ça montre bien que la personne n’a pas compris ou n’adhère pas à l’anti-spécisme, autrement elle ne se cacherait pas derrière l’attitude de quelques véganes (individus dont l’attitude n’a aucun rapport avec le fait que la société fait exploiter et consommer des animaux). Encore une fois, à mon sens, c’est un détournement du vrai sujet. Est-ce qu’on doit accorder de l’importance à quelqu’un dont on pourrait résumer le propos par « je vais continuer à financer le massacre de milliards d’animaux, parce-que Truc et Muche les véganes sont aggressifs. Snif. » ? Hummm nope !

        Je doute aussi que « l’agressivité » si souvent pointée du doigt soit exempte de tout contexte. Si une personne végane a en face d’elle quelqu’un qui la provoque (qui ne connaît pas les fameux « miam, ça me donne juste envie de manger un bon steak saignant » et autres « blagues » ?), je comprend qu’à certains moments elle soit à même de penser que la pédagogie ne sera pas fructueuse et que sa sérénité ait des limites.

        Chacun à notre manière on peut apporter notre pierre à l’édifice. A mon avis, le résultat dépendra d’avantage de la capacité d’écoute, de réflexion et de volonté de compréhension de la personne non végane, que de l’attitude de n’importe quel porte-parole. On ne peut accompagner qu’une personne apte à se remettre en question. On guide, on informe, on ne contraint pas. Les véganes sont un relais d’information très utile, mais le véganisme, c’est avant tout un choix individuel, on n’est seul responsable de notre décision de ne plus exploiter et tuer les animaux. Au bout du compte, la seule personne qu’on peut réellement convaincre c’est nous même.

        A discuter de tout cela, je serai curieuse de lire un grande quantité de témoignages de véganes qui expliquent leur adoption de ce mode de vie. Peut être qu’en commençant par là, en étudiant et recroisant ces données, on trouverait d’avantage de pistes pour aider une personne désireuse de questionner sa consommation de produits animaux.

        • 19

          Je suis complètement d’accord avec toi, et en particulier qu’avoir des témoignages / études sur ce qui a convaincu les véganes à le devenir aideraient vraiment à identifier les stratégies qui semblent les plus efficaces. C’est d’ailleurs aussi la conclusion de l’article de l’AVF.
          Et oui, blâmer les véganes pour ne pas passer à l’acte, c’est effectivement fallacieux. De plus il aurait là aussi été intéressant d’avoir plus des détails (par exemple je trouve que ce n’est pas pareil si ce sont des questions ouvertes ou fermées, dans ce dernier cas le choix de réponse influence davantage la personne, peut-être qu’en cas de questions ouvertes le % serait réduit).

          En fait, je te rejoins sur la plupart de ton propos; le seul point où je diffèrerais c’est sur le fait que les véganes doivent coûte que coûte montrer un front uni du fait que nous sommes tous / toutes véganes. Etre solidaire et travailler ensemble pour faire reculer l’exploitation animale: bien sûr. Ne pas condamner des propos extrêmes comme ceux de Yourovsky (qui disait qu’une femme portant de la fourrure mériterait d’être violée) sous prétexte qu’on est du même camp: non. Et malheureusement, ce genre ce propos n’est pas anecdotique, j’en vois très souvent sur les réseaux sociaux.
          Bien sûr, ça va aussi dans l’autre sens : les véganes aussi se font prendre à parti et insulter sur les réseaux sociaux. Je comprends et partage la frustration qu’on peut éprouver devant tous ses trolls qui « nous cherchent ». Dans ce cas, je suis la règle du « don’t feed the troll », parce que ça ne sert vraiment à rien : comme tu le soulignes très justement, on ne peut pas forcer quelqu’un à écouter un message qu’il / elle n’a pas envie ou n’est pas prêt.e à entendre.

          • 20

            En effet, l’idée n’est pas de fermer les yeux ou supporter des propos indignes. Sur le cas Yourovsky que tu cites, ce qu’il dit est totalement condamnable, pas de doute là dessus. Mais c’est l’entretien de la culture du viol, et l’incitation à la violence sexiste qui sont au cœur du scandale, pas le véganisme en tant que tel. Ce n’est pas tant qu’il a exprimé de l’agressivité en parlant de véganisme, que le fait d’avoir dévoilé sa mentalité immonde envers les femmes. Fourrure ou pas, personne ne mérite d’être violé.

            Quand il dit ce genre de chose, il ne contribue pas à promouvoir la justice pour les êtres vivants (que ce soit celle des animaux ou des humains). Il n’y a donc aucune raison de justifier ou enfouir ses propos, c’est à lui seul d’assumer. Par cette phrase, il ne représente personne d’autre que lui même (enfin j’espère qu’il n’y a pas derrière des gens qui en concluraient que végane = violeur). Ce n’est pas sa manière de s’exprimer qui est problématique (ce dont traite ton article et notre petite discussion), c’est son propos.

Comments are closed.